Migraines : qu’est-ce que c’est ?

Parmi les divers maux de tête (céphalées) la migraine occupe une place à part. Elle se caractérise par la répétition de crises de céphalées obéissant à des critères précis, définis en 1988 par l’International Headache Society.

Décrite depuis l’Antiquité comme une douleur affectant la moitié du crâne (hémicranie) la maladie migraineuse obéit dans la définition de l’International Headache Society (1988) à des critères précis. Elle se caractérise par la survenue répétée de crises de céphalées (maux de tête) unilatérales, pulsatiles (on y sent les battements du cœur), aggravées par l’effort physique, le bruit et la lumière, et accompagnées de nausées et de vomissements.

Ces crises durent entre 4 et 72 heures et peuvent être modérées ou sévères obligeant le patient à s’allonger au calme et dans le noir. Le sommeil peut les soulager. Elles se répètent entre une à quatre fois par mois pour 70% des patients, qui sont par ailleurs en bonne santé entre ces épisodes migraineux. Débutant le plus souvent en fin de nuit, elles peuvent aussi survenir plus tard dans la journée, souvent à la même heure pour le même malade.

Les crises peuvent être précédées de signes avant-coureurs plus ou moins repérés et plus ou moins bien interprétés par les patients : il peut s’agir de troubles de l’humeur (abattement ou euphorie), de troubles de l’appétit, (manque d’appétit ou faim anormale en particulier pour les aliments sucrés (comme le chocolat), qui sont ensuite incriminés à tort comme facteurs déclenchants), difficultés de concentration, etc.

Certaines formes sont plus rares

Certains sujets présentent des migraines plus rares (20% des cas) au cours desquelles la céphalée est précédée de symptômes appelés « aura » : il s’agit le plus souvent de signes visuels (tache sombre entourée d’un halo scintillant dite « scotome scintillant » ou lignes géométriques en « fortification de Vauban », ou simples taches lumineuses et brillantes dans la moitié du champ de vision, ou encore amputation de ce champ visuel). Plus rarement, il s’agira de troubles de la sensibilité à type d’engourdissement de la main et du visage d’un côté, plus rarement encore de troubles du langage et de déficit moteur.

Ces auras durent en principe 15 à 20 minutes (toujours moins d’une heure) et peuvent se succéder. Leur disparition est suivie de la céphalée typique de migraine plus ou moins intense.

Plus exceptionnelles encore sont les migraines avec déficit moteur touchant la moitié du corps (hémiplégiques) ou avec paralysie d’un nerf moteur oculaire (ophtalmoplégiques).

La migraine varie selon les âges et le sexe

Il s’agit d’une affection fréquente touchant environ 12% de la population adulte, deux fois plus souvent la femme que l’homme mais, pour diverses raisons, on estime que seulement 50% des migraineux consultent.

La maladie débute dans l’enfance ou l’adolescence, est maximale entre 30 et 40 ans et s’atténue ensuite.

Il s’agit d’une affection invalidante et imprévisible. La périodicité des crises varie d’un patient à l’autre et chez le même patient : 75% d’entre eux ont entre une crise par semaine et une crise par mois et plus de la moitié d’entre eux estiment que leur qualité de vie est altérée par la migraine.

Chez l’enfant : on estime entre 5 et 10% le nombre d’enfants migraineux. Chez eux, les crises sont volontiers plus courtes et bien soulagées par le sommeil. Elles peuvent aussi se manifester par des vomissements répétés ou plus rarement des phénomènes vertigineux.

Chez la femme la maladie peut être rythmée par la vie hormonale : la migraine devient plus fréquente chez la fille que chez le garçon après la puberté, les crises peuvent survenir uniquement au moment des règles (migraines cataméniales), elles disparaissent généralement au cours de la grossesse et après la ménopause. La prise d’oestroprogestatifs (« pilule ») ou de traitements hormonaux peut modifier le rythme et la gravité des crises.

Parfois, les crises sont quotidiennes

Enfin chez certains patients, la fréquence des crises s’intensifie jusqu’à devenir quotidienne tandis que les symptômes en sont moins typiques. C’est ce que l’on appelle migraine transformée ou céphalée chronique quotidienne. La transformation se fait le plus souvent lors d’un abus médicamenteux avec apparition d’une dépendance en antimigraineux et antalgiques et/ou lors d’intrication de la migraine avec des céphalées de tension (d’origine psychogène) à la faveur d’un état dépressif plus ou moins évident. Le traitement consiste en un sevrage médicamenteux souvent difficile à mettre en œuvre nécessitant parfois une hospitalisation : l’information des patients sur ce risque, lié souvent à l’automédication, devrait en réduire la fréquence.

L’examen clinique neurologique du migraineux est toujours normal et les examens complémentaires de routine que l’on peut parfois être amené à demander sont également normaux (scanner, radiographies de crâne, sinus, électroencéphalogramme, etc.). Il n’est d’ailleurs pas justifié de les demander devant des symptômes typiques de migraine. En revanche en cas d’atypie, d’évolution inhabituelle ou devant des signes anormaux à l’examen neurologique, ils sont nécessaires pour éliminer d’autres pathologies responsables de céphalées.

Migraines : d’où cela vient-il ?

Les origines exactes de la maladie migraineuse restent mystérieuses. Des facteurs génétiques interviennent, prédisposant le patient à faire des crises.

Le caractère familial de la migraine est bien connu des patients et les conforte d’ailleurs à tort à se résigner devant cette maladie qui affectait déjà leur grand-mère, oncle, etc., pour laquelle « on ne peut rien faire, on est comme çà dans la famille… ». Les grandes études de famille ont confirmé cette notion intuitive du caractère familial de la maladie. Les études de jumeaux monozygotes (strictement identiques sur le plan génétique parce qu’issus de la même cellule œuf) montrent une corrélation plus élevée chez eux que chez les jumeaux hétérozygotes (issus d’œufs différents). Mais cette concordance n’est pas absolue et l’hérédité n’est pas seule en cause et des facteurs environnementaux interviennent aussi. Le mode de transmission de la migraine commune est probablement polygénique, c’est-à-dire lié à plusieurs gènes.

La migraine hémiplégique familiale

Seule la très rare migraine hémiplégique familiale (MHF), qui provoque des troubles moteurs, a une hérédité monogénique (liée à un seul gène) autosomique dominante (les sujets atteints sont des hommes ou des femmes et le risque qu’un descendant soit atteint est de 50%). Le gène responsable de cette maladie a été identifié : il s’agit d’un gène codant pour un canal responsable du passage du calcium dans les membranes cellulaires. Ce gène est localisé sur le chromosome 19 dans 50% des cas, mais un autre gène situé sur le chromosome 1 est impliqué dans 20% des familles de MHF. Enfin dans 30% des cas le gène n’est situé ni sur le chromosome 19 ni sur le chromosome 1.

Reste à savoir maintenant si le gène impliqué dans la MHF l’est également dans les formes plus habituelles de migraines, les résultats actuels étant contradictoires. Puis de comprendre comment les diverses mutations du gène aboutissent aux symptômes divers présentés par les patients.

Migraines : comment cela marche-t-il ?

Des progrès ont été accomplis dans la connaissance des mécanismes de la crise même s’il persiste encore de nombreuses inconnues.

Longtemps mystérieux, les mécanismes de la crise migraineuse commencent à bénéficier des progrès scientifiques pour leur compréhension.

Les mesures de débit sanguin cérébral puis les techniques plus sophistiquées d’IRM (imagerie par résonance magnétique) fonctionnelle ont mis en évidence une dépression de l’activité cérébrale. Progressant de la partie postérieure du cerveau vers l’avant, elle est appelée dépression corticale envahissante ou spreading depression et traduit la progression des signes neurologiques, en particulier visuels, précédant la céphalée dans les migraines avec aura. La question de l’existence de cette dépression dans les migraines communes (sans aura) n’est pas totalement tranchée même s’il existe des arguments pour penser qu’elle pourrait aussi exister dans ces cas.

L’inflammation neurogène

La douleur migraineuse naît dans le tronc cérébral au niveau du système trigéminovasculaire proposé par Moskowitz, puis prouvé par la suite : à la suite de diverses stimulations, le noyau du nerf trijumeau, nerf sensitif innervant la face, les vaisseaux superficiels et méningés, est stimulé (ce noyau est situé dans le tronc cérébral).

Phase neurologique de la crise de migraine

Cette stimulation entraîne une activation à contre-courant des fibres de ce nerf qui vont déclencher une inflammation dite neurogène au niveau des artères méningées, qu’elles innervent par libération de peptides inflammatoires, avec dilatation de ces artères qui elle-même stimule en retour le noyau du trijumeau.

Le phénomène diffuse dans le tronc cérébral aux centres du vomissement et vers le cortex cérébral responsable de l’intégration de la perception de la douleur. Les terminaisons nerveuses de ce système au niveau des artères méningées sont riches en récepteurs 5HT1B/D à la sérotonine. Celle-ci freine ces phénomènes d’inflammation neurogène et les nouveaux antimigraineux, testés sur ce modèle imaginé par Moskowitz d’inflammation neurogène, sont des agonistes de ces récepteurs ce qui explique leur efficacité.

Les inconnues

Des inconnues persistent néanmoins : les phénomènes corticaux déclenchent-ils la céphalée par activation du système trigéminovasculaire, et comment ? Ou y a-t-il des générateurs communs au déclenchement de la spreading depression et de l’activation du système trigéminovasculaire ?

Comment les facteurs déclenchants bien connus des patients interviennent-ils pour déclencher la crise ? Pourquoi la céphalée est-elle unilatérale ? Pourquoi et comment s’arrête spontanément une crise ?

Migraines : facteurs déclenchants

De nombreux événements sont susceptibles de déclencher des crises ou de provoquer une modification de la maladie migraineuse.

Les facteurs déclenchants possibles des crises migraineuses sont multiples et peuvent s’associer chez le même patient. Si certains sujets reconnaissent un facteur déclenchant précis et peuvent ainsi l’éliminer, il ne faut pas en revanche que tous les migraineux s’imposent à tort un régime ou un mode de vie qui aura peu de chances d’améliorer leur maladie. Enfin, le cours de celle-ci peut varier selon diverses circonstances qu’il faut savoir repérer.

Les facteurs psychologiques et les modifications du rythme de vie sont le plus souvent en cause. Le stress, les contrariétés, les émotions peuvent déclencher des crises, le plus souvent au moment du relâchement du stress, ce qui parfois conforte à tort le patient et son entourage sur le caractère « psychologique donc imaginaire » de cette maladie.

De même, le changement de rythme de vie est mal toléré par ces patients dont certains font des crises préférentiellement le week-end ou lors de départ en vacances ou en voyage, ce qui n’est pas bien vécu par leur entourage et aggrave alors les répercussions psychologiques de la maladie. Les migraines peuvent s’intensifier en cas de surmenage. Chez l’enfant, elles sont plus fréquentes en période scolaire que pendant les vacances, ce qui peut aggraver la mauvaise perception qu’en a l’entourage familial ou scolaire supposant que l’enfant trouve ainsi une excuse pour ne pas aller en classe alors qu’il s’agit souvent d’élèves consciencieux… Les changements professionnels ou de mode de vie peuvent de même aggraver la maladie même s’ils sont favorables (promotion professionnelle ou chômage, mariage, etc).

Environnement et hygiène de vie

Des facteurs climatiques (vent, orage, chaleur ou froid excessif, orages) ou des facteurs sensoriels (lumière, bruit, odeurs) sont aussi incriminés dans la survenue de crises.

Les modifications du sommeil peuvent être en cause, le manque de sommeil comme la grasse matinée pouvant déclencher des crises. De même, un repas sauté, ou une prise irrégulière des repas, l’arrêt de la consommation de café sont aussi reconnus par certains sujets comme les exposant à faire une crise.

Les habitudes alimentaires sont souvent mises en cause du fait de l’existence de troubles digestifs au cours de la crise. Il faut néanmoins être vigilant et ne pas attribuer à tort une origine alimentaire à toutes les migraines et contraindre les patients à des régimes inutiles. Toutefois certains aliments entraînent régulièrement des crises chez certains patients et ils gagneront à les éviter : il s’agit le plus souvent du chocolat, du vin blanc et des alcools, certains fromages et agrumes.

Hormones et dépression

Les facteurs hormonaux influencent chez la femme le rythme des crises et expliquent vraisemblablement la plus grande fréquence de la maladie chez elles. Les œstroprogestatifs (pilule) jouent aussi leur rôle et doivent être utilisés avec prudence chez ces patientes. (cf. question « Migraine et vie hormonale chez la femme »)

Les traumatismes crâniens et l’arthrose cervicale sont souvent mis en cause par les patients mais ils sont exceptionnellement responsables de migraines.

Il faut noter que ces facteurs déclenchants s’associent souvent pour déclencher des crises et que chez un même patient le même facteur peut, à certaines périodes, déclencher des crises et à d’autres être inoffensif. Certains peuvent facilement être évités par les patients comme les facteurs alimentaires tandis que d’autres, entraînant régulièrement des crises, sont difficilement évitables (déplacements professionnels, facteurs hormonaux, etc.).

Enfin, souvent à l’occasion d’un état dépressif, la répétition des crises et l’augmentation progressive et inappropriée des traitements de crise peuvent entraîner une modification des migraines et l’apparition de céphalées quotidiennes chroniques constituant un tournant évolutif difficile de la maladie migraineuse.

Pour toutes ces raisons, et aussi pour mieux guider le traitement, il est conseillé de tenir un agenda de la migraine qui permettra entre autres de mieux cerner les facteurs et circonstances qui déclenchent des crises.

Migraines : comment vivre avec ?

La maladie migraineuse a fait l’objet de consignes sur l’hygiène de vie qui ne sont plus toutes de rigueur.

Les consignes d’hygiène de vie ne sont plus recommandées actuellement avec autant de vigueur que par le passé : d’une part, parce qu’elles n’ont pas fait preuve d’efficacité importante, d’autre part, parce que l’on dispose de traitements de crise plus efficaces qu’auparavant.

Les consignes d’hygiène de vie sont difficiles à donner et ne sont pas valables pour tous les patients. On s’appliquera évidemment à l’éviction de facteurs de risques régulièrement retrouvés dans le déclenchement des crises, mais l’on évitera aussi de soumettre de façon abusive les sujets à des régimes alimentaires qui ne modifient en rien le cours de leurs migraines.

Reconnaître les périodes sensibles

Les patients seront amenés à reconnaître des périodes sensibles au cours desquelles les facteurs déclenchants peuvent se conjuguer : en période de surmenage ou de stress, un repas et un coucher tardifs, une boisson alcoolisée peuvent entraîner une crise alors qu’ils seraient bien tolérés en une période plus calme.

La pratique régulière d’une activité sportive est bénéfique par son effet de détente pour les migraineux alors que des efforts physiques violents et inhabituels peuvent déclencher des crises

Dans la même optique, les activités de relaxation (yoga, sophrologie…) peuvent être bénéfiques pour certains patients.

Néanmoins, on manque d’arguments scientifiques solides pour imposer de façon formelle un mode de vie quelconque à ces patients qui doivent eux-mêmes composer avec leur maladie et leurs obligations.

Migraines : quel traitement ?

Une bonne prise en charge du patient migraineux repose sur un dialogue de bonne qualité.

Le migraineux ayant souvent l’impression justifiée que sa maladie n’a pas été jusque-là reconnue ou prise au sérieux, il recherche un dialogue de bonne qualité avec son médecin. Les buts du traitement de crise et de fond devront bien être établis et l’appréciation de l’efficacité du traitement sera aidée par une bonne coopération du patient (tenue d’un agenda des crises, par exemple).

La prise en charge du migraineux varie d’un patient à l’autre selon son type de crise, son mode de vie, les répercussions de la crise sur son travail, sa vie familiale, relationnelle, etc. La migraine a longtemps été négligée au cours des études médicales, sous-estimée dans ses répercussions par les médecins qui la confondaient avec un mal de tête plus banal, quand ils ne l’interprétaient pas comme d’origine purement psychologique puisque souvent féminine. Si bien que les patients se sont longtemps résignés à la traiter par eux-mêmes, tant bien que mal, acceptant avec fatalisme cette maladie qu’ils avaient héritée d’un parent migraineux plus ou moins proche… Des essais de traitement souvent multiples, non adaptés et infructueux les confortaient dans l’idée que « l’on n’y peut rien »

La confiance doit donc être établie entre le migraineux, qui doit se sentir pris au sérieux pour adhérer au mieux à son traitement et le médecin qui doit faire comprendre qu’il a bien perçu le handicap que peut représenter la migraine. Les buts du traitement doivent par ailleurs être expliqués ainsi que les résultats que l’on peut escompter. Le traitement comporte toujours un traitement de crise que l’on peut associer à un traitement de fond visant à prévenir l’apparition des crises et à en réduire l’intensité si elles surviennent malgré tout.

Le traitement de crise fait appel à des produits d’efficacité différente

L’application d’une compresse froide ou chaude pourra soulager la douleur, la prise d’un café fort en début de crise pourra la faire cesser, mais le plus souvent on doit avoir recours à des médicaments qui devront être pris dès le début de la crise.

On peut faire appel à des traitements non spécifiques de la migraine : antalgiques (médicaments antidouleur) comme le paracétamol, l’aspirine, les anti-inflammatoires non-stéroïdiens (non dérivés de la cortisone) ou à la noramidopyrine (celle-ci expose toutefois à un risque d’atteinte sanguine grave quoique rare).

On peut recourir aussi à des traitements spécifiques de la crise migraineuse : les dérivés de l’ergot de seigle sont les plus anciens, sous forme de dihydroergotamine ou tartrate d’ergotamine que l’on peut utiliser sous forme de comprimés, d’injections, de suppositoires et de spray nasal. Leurs effets secondaires sont liés à la constriction des vaisseaux qu’ils peuvent entraîner.

Les plus récents sont les triptans d’action spécifique agoniste des récepteurs 5HT1B/1D à la sérotonine du système trigéminovasculaire responsable de la céphalée migraineuse. Plusieurs sont déjà commercialisés sous forme de comprimés, de spray nasal et d’injections sous-cutanées. Les effets secondaires sont transitoires : sensations de chaleur, fourmillements, oppression thoracique surtout, ce qui les fait contre-indiquer en cas de pathologie des artères du cœur (coronaires).

Ces différents traitements de crise seront choisis selon les caractères des crises en particulier leur gravité, les patients différenciant souvent bien ce qui va être une « petite » crise d’une crise d’emblée sévère. Le mode d’administration du produit dépend aussi de l’importance des nausées au cours de la crise et l’on pourra d’ailleurs s’aider de médicaments contre les vomissements.

Le traitement de fond

Le traitement de fond sera indiqué quand les crises seront sévères, fréquentes, retentissant sur la vie quotidienne du patient et quand le recours au traitement de crise devient trop fréquent et quand ce traitement perd de son efficacité.

Plusieurs molécules sont disponibles : dérivés de la dihydroergotamine, bêtabloquants, pizotifène, méthysergide, oxétorone. Le choix du traitement de fond dépend de ses effets secondaires attendus et des contre-indications propres à chaque patient ainsi que du type des crises.

Un agenda des migraines

Dans tous les cas, la tenue par le patient d’un agenda de ses crises permettra de suivre l’efficacité des traitements, aussi bien de crise que de fond, et permettra d’ajuster le traitement lors de la consultation suivante.

Enfin une bonne information lors de la première consultation doit aussi éviter le passage en céphalée quotidienne chronique, état survenant chez un migraineux dont les crises s’aggravent, se modifient en devenant plus fréquentes et souvent liées à une prise abusive de médicaments de crise. L’aggravation de fréquence des crises peut être due à un effet rebond des médicaments (reprise de la céphalée à la fin de l’effet du médicament) et/ou à un état dépressif associé.

Migraines : vos questions

D’où viennent les migraines ?

Il existe une prédisposition génétique à faire des crises, prédisposition sur laquelle on ne peut rien et à laquelle se surajoutent des facteurs liés à l’environnement, au mode de vie, etc. que l’on peut parfois modifier.

Est-ce héréditaire ?

Il existe une prédisposition familiale à la migraine qui est, par exemple, plus fréquemment associée chez les vrais jumeaux que chez les faux mais cette association n’est pas systématique, ce qui laisse supposer l’existence de plusieurs gènes de sensibilité auxquels s’ajoutent des facteurs environnementaux.

Est-ce dangereux ?

Malgré l’intensité de la céphalée au cours de certaines crises, la migraine n’est pas dangereuse en elle-même. De très rares migraines sont les symptômes de maladies neurologiques plus sévères mais le médecin (neurologue) est à même de les dépister.

Est-ce hormonal ?

Les rythmes hormonaux interviennent chez la femme expliquant la plus grande fréquence des crises chez elle, la classique amélioration pendant la grossesse et la diminution après la ménopause. Mais les facteurs hormonaux n’expliquent pas tout.

Est-ce digestif, lié au foie, à la vésicule ?

Il y a des signes digestifs importants au cours des crises de migraine, mais ils sont la conséquence de la crise et non sa cause. Le foie n’est pas responsable et la « crise de foie » (ce terme n’existe qu’en France) est en fait une crise de migraine.

Est-ce la vue ?

Même si au cours de certaines crises (migraines ophtalmiques) il existe des troubles visuels, les vraies migraines ne sont pas liées à une altération visuelle et la correction d’un défaut de la vue ne les améliore pas. Les céphalées qui peuvent être dues à un trouble visuel sont différentes des migraines.

Est-ce dû aux sinus ?

Souvent incriminées à l’origine de céphalées, les affections des sinus ne sont pas responsables de vraies migraines.

Est-ce psychologique ?

Le déclenchement des crises par le stress ou le relâchement psychologique après le stress, par les contrariétés, les émotions… est bien connu. Néanmoins, les symptômes de la crise ne sont pas le fruit de l’imagination du patient comme le laisse sous-entendre de façon parfois péjorative le terme « psychologique ». La confusion faite dans le public entre le facteur déclenchant qui peut être d’ordre psychologique et la crise elle-même qui est bien organique accroît la sensation d’incompréhension que ressent parfois le migraineux.

Faut-il faire un scanner, un électroencéphalogramme, d’autres examens (du foie, de la vue, des sinus etc.) ?

Lorsque les symptômes de migraine sont bien typiques, lorsqu’il y a de plus un terrain familial ou des facteurs déclenchants classiques, il n’y a pas lieu de faire des examens. En revanche, le médecin guidera au mieux les examens complémentaires quand la migraine n’est pas typique ou qu’elle s’aggrave sans raison ou, a fortiori, quand existent des anomalies de l’examen clinique neurologique.

A quel âge cela peut-il commencer ?

La plupart des migraines débutent à l’adolescence mais la migraine n’est pas rare chez l’enfant : on estime à 5 à 10% le nombre d’enfants migraineux. Il y en a probablement plus, dont les crises sont sous-estimées ou mal interprétées. Les cas les plus précoces de migraines ont été décrits à l’âge de trois ans, les crises sont plus facilement reconnues à partir de 6 ans.

 

Qui consulter pour la migraine ?

Le diagnostic et la prise en charge de la migraine sont du ressort du médecin généraliste. Beaucoup de patients (plus de 50%) ne consultent pas pour leurs migraines. Il est utile de connaître les progrès réalisés dans ce domaine.

Consulter pour une migraine, c’est expliquer de façon précise la situation au médecin et non pas terminer une consultation par « au fait, Docteur, pourriez-vous me donner quelque chose pour le mal de tête »… Sur demande du médecin traitant, le spécialiste à consulter est le neurologue qui est le mieux placé de par sa spécialité pour confirmer l’origine du mal de tête. Il peut aussi pour certains cas particuliers demander une consultation spécialisée dans un centre de traitement de la migraine ou de la douleur.

Je prends la pilule, est-ce la cause de mes migraines ?

La pilule n’est pas la cause de la migraine. Il peut cependant arriver qu’elle accentue les crises. On peut faire un test en changeant de pilule ou opter pour un traitement de fond de la migraine. Quelquefois, la prise de pilule est arrêtée afin de voir si les migraines s’espacent.

Dois-je m’arrêter de fumer ?

Si vous prenez la pilule, il conseillé d’arrêter de fumer car les risques d’accidents vasculaires sont augmentés par l’association migraine-pilule-tabac, surtout chez la femme jeune.

Je suis enceinte et j’appréhende la survenue d’une crise. Que puis-je faire ?

Dans la majorité des cas, les crises de migraine disparaissent pendant la grossesse. Si quelques crises subsistent, les méthodes non médicamenteuses telles que la relaxation sont à privilégier. Pour les médicaments, certains antalgiques peuvent être prescrits par le médecin, ou s’ils sont inefficaces les anti-inflammatoires au début de la grossesse. Très rarement, on a recours à un traitement de fond. Bien entendu, un suivi médical s’impose.

J’ai très souvent la migraine le week-end, pourquoi ?

Chez certaines personnes, la migraine survient régulièrement le week-end. Cela peut tenir à différents facteurs :

  • relâchement le week-end après une semaine « sous pression »,
  • faire la grasse matinée,
  • consommation de café différente le week-end.

Essayez alors de garder le même rythme de réveil, la même consommation de café et d’apprendre à mieux gérer le stress de la vie quotidienne.

Qu’est-ce que la céphalée avec abus médicamenteux ?

Chez certains migraineux, les crises deviennent de plus en plus fréquentes. Ils prennent alors de plus en plus de médicaments de la crise. Progressivement, le mal de tête devient quotidien et l’on prend des doses de plus en plus importantes d’antalgiques et/ou d’antimigraineux.

Or, il a été démontré que l’usage important d’antalgiques ou d’antimigraineux est en fait un facteur d’entretien de ce type de céphalées. Il faut alors, sous suivi médical, arrêter totalement les prises. Ces sevrages se font au domicile mais peuvent parfois réclamer une hospitalisation. Après la période de sevrage, les personnes n’ont plus le mal de tête quotidien. Elles retrouvent la douleur intermittente qu’elles avaient avant l’abus médicamenteux.

 

Mon enfant a des maux de tête. Est-il migraineux comme moi ?

• Fréquence d’un contexte familial migraineux ;

• Etre sûr qu’il s’agit d’une migraine :

  • avis médical nécessaire ;
  • possibilité de sinusite ou de troubles visuels ;
  • possibilité de douleur prétexte.

• Si la mère est migraineuse, possibilité de vraie migraine ;

• Traitement :

  • sommeil très efficace ;
  • antalgiques et anti-inflammatoires ;
  • relaxation et contexte propice ;
  • traitement de fond exceptionnel.

Pilule et migraine

  • La pilule n’est pas la cause de la migraine ;
  • La pilule peut aggraver, accentuer les crises ;
  • Possibilité de changer de pilule, voire d’arrêter momentanément pour voir.

Migraine et tabac

S’il y a prise de pilule : arrêter de fumer. L’association migraine-pilule-tabac augmente les risques d’accidents vasculaires.

Migraine et grossesse

  • Normalement, disparition des crises ;
  • Privilégier les moyens non-médicamenteux ;
  • Traitements anti-inflammatoires et antalgiques possibles.

Migraine le week-end

Responsables possibles :

  • relâchement de la pression ;
  • grasse matinée, nuit plus longue ;
  • consommation de café différente.

Tenter de garder un rythme plus homogène, de boire du café et de mieux gérer la pression.

Migraine et médicaments

  • La prise de médicaments répétée contre les migraines est un facteur d’entretien de certaines céphalées. Vrai pour les antalgiques et les antimigraineux ;
  • Nécessaire d’arrêter les prises mais sous contrôle médical ;
  • Résultat : disparition des crises au quotidien et fréquence des crises plus classique.

Migraine et vie hormonale féminine

Les divers épisodes de la vie hormonale chez la femme modifient chez elle l’évolution de la maladie.

Il est bien connu que les facteurs hormonaux interviennent sur l’évolution de la migraine. Ainsi, alors que la migraine est aussi fréquente chez le garçon que chez la fille avant la puberté, sa fréquence double chez la fille après la puberté et environ 15 à 20% des migraineuses voient leurs crises débuter à cette période.

60% des migraineuses établissent un lien entre leurs cycles et leurs migraines. Les études démontrent que seulement 5 à 10% ont en fait des migraines purement cataméniales, c’est-à-dire survenant uniquement au moment des règles. Pour les autres, il existe des migraines, en dehors de cette période, associées à des migraines cataméniales qui sont souvent les plus sévères. Cette recrudescence cataméniale correspond surtout à des migraines sans aura.

Une pause pendant la grossesse

Il est classique aussi que la migraine s’améliore pendant la grossesse surtout au cours des deuxième et troisième trimestres. L’accouchement est par ailleurs souvent suivi de reprise des céphalées dans les quelques jours qui suivent… Quelques rares migraines s’aggravent pendant la grossesse et la difficulté alors est de trouver des médicaments qui ne soient pas toxiques pour le fœtus.

Après une aggravation dans la période précédant la ménopause, celle-ci est accompagnée d’une amélioration de la maladie chez plus de la moitié des migraineuses mais la prépondérance féminine de la maladie se maintient quand même après cet âge.

L’action de la pilule

La contraception orale peut modifier aussi l’évolution de la migraine. Une aggravation est notée dans plus de 30% des cas alors que d’autres patientes ne verront pas leur migraine se modifier et que de plus rares seront même améliorées. Certaines migraines débutent avec la prescription de « pilule » et l’arrêt de celle-ci n’est pas forcément suivi immédiatement d’amélioration. L’influence du contenu en œstrogènes n’est pas clairement établie et on adaptera en fonction de chaque patient mais, par principe, on choisit en premier les pilules faiblement dosées en œstrogènes pour diminuer le risque de survenue d’accident vasculaire cérébral : la prise de pilule chez une migraineuse multiplie en effet le risque de ces accidents. Ce risque est encore accru si la patiente fume ou a des facteurs de risque vasculaire (cholestérol) et, dans ces cas, on choisira un autre mode de contraception.

Le traitement hormonal substitutif de la ménopause a un effet variable sur les migraines qui persistent à cette période, celles-ci se trouvant aggravées ou améliorées. En revanche, il ne semble pas accroître le risque d’accident vasculaire cérébral et n’est pas contre-indiqué par l’existence de la migraine.

Migraine et vin

Rôle déclenchant : réside-t-il dans l’alcool ?

La prise d’alcool déclenche la crise migraineuse chez 20 à 50% des patients.

L’alcool n’est pas le seul en cause et les composants de vin jouent un rôle.

Tous les vins ont-ils la même influence ?

La biologie des flavonoïdes semble condamner sans appel le vin rouge en exonérant le blanc de toute responsabilité ou presque. Elle vient cependant totalement contredire l’opinion la plus généralement admise en France : celle d’une nocivité préférentielle des vins blancs.

Or, on ne saurait mépriser l’expérience d’une longue tradition. De même, le problème « sulfureux » des additifs dérange ; leur usage raisonnable fait cependant partie intégrante des pratiques de vinification les plus honorables. Leur impact sur le pouvoir migraino-déclenchant du vin reste à déterminer.

Quels critères pour prendre un vin ne déclenchant pas la migraine ?

  • ceux sont les flavonoïdes qui sont responsables ; ils sont présents en plus grande quantité dans les vins rouges que les dans les vins blancs,
  • les anthocyanines, groupe de flavonoïdes disparaissent avec le temps : mieux vaut consommer des vins plus vieux.

Effet protecteur cardio-vasculaire du vin et lien entre migraine et maladies

Considérer la migraine, sinon comme un facteur de risque à part entière, du moins comme un cofacteur additif aux causes habituelles de l’athérome.

La migraine semble occuper une place non négligeable chez l’adulte jeune, en particulier la femme, surtout si elle cumule d’autres facteurs favorisants : contraception orale et tabagisme en particulier.

Une configuration de ce type impose de mettre en balance les risques de l’alcool tant généraux que céphalgogènes avec le bénéfice escompté sur la maladie athéromateuse d’une consommation « modérée » de boissons alcoolisées.

Les médias se sont largement fait écho d’un tel effet favorable, achoppant cependant sur la définition très individuelle de la modération. Clairement démontré par l’épidémiologie, sous le terme de « French paradox », cet effet antiathéromateux résulterait de l’action des composés les plus générateurs de migraine : les flavonoïdes. Il serait l’apanage sinon exclusif du moins prédominant du vin rouge.

Quoi qu’il en soit, on ne prend guère de risque à délivrer quelques conseils de bon sens, bien que dépourvus d’originalité :

  • la modération dans la qualité absorbée,
  • la prédilection pour les vins vieux et longs en bouche, ce qui revient implicitement à privilégier la qualité et la quantité,
  • l’évitement des facteurs de risque synergiques au premier rang duquel figure le stress.
  • Migraines
  • Migraine et alimentation

Quels sont les aliments le plus souvent en cause dans le déclenchement de migraines ?

  • 68% boissons alcoolisées,
  • 63% chocolat,
  • 50% graisses cuites,
  • 36% œufs,
  • 27% mayonnaise,
  • 13% oignons,
  • 13% restaurant chinois.

Fait étrange et sans explication réelle :

  • le vin rouge est le vin qui donne des migraines dans tous les pays du monde, sauf en France où le vin incriminé est surtout le vin blanc, ainsi que les vins de Champagne. Serait-ce le deuxième « French paradox » ?
  • tous les pays du monde évoquent les fromages comme facteur déclenchant, sauf la Hollande,
  • les agrumes sont mis en cause dans les pays méditerranéens et pas ailleurs !

Il existe enfin une corrélation entre fromage, vin et chocolat avec des déclenchements croisés chez un même individu.

Les crises de migraine surviennent souvent dans les 2 à 3 heures qui suivent la prise de « l’objet du délit », mais certaines formes apparaissent tardivement, jusqu’à 24 heures après le repas.

Comment les aliments peuvent-ils déclencher une crise ?

Malgré de nombreuses études sur l’hypothèse immuno-allergique, celle-ci est peu probable. En tout état de cause, il ne s’agit pas d’une allergie de type I, mais de type III, et les traitements antihistaminiques sont inefficaces.

La thèse pharmacologique est bien plus satisfaisante. Les études mettent en évidence le rôle de certains composés chimiques au sein d’un aliment et non l’aliment dans son ensemble. Le rôle joué par les amines vasoactives, dont chocolat, vin et fromages sont riches, paraît prépondérant. Ainsi, la tyramine est un grand pourvoyeur de migraines d’origine alimentaire. On la retrouve dans le poisson, le fromage, les saucisses en sachet, les choux raves, certains vins et dans la bière.

L’alimentation peut-elle être responsable, seule, de la maladie migraineuse ?

Certains aliments sont des facteurs déclenchant parmi d’autres, mais la conjonction de plusieurs facteurs est souvent nécessaire pour atteindre un seuil déclenchant de la migraine.

Ces autres facteurs sont bien connus :

  • le stress, l’anxiété ou l’émotion,
  • le cycle hormonal chez la femme et par analogie la contraception orale,
  • un facteur physique comme un exercice intense, un changement du rythme de sommeil (trop ou trop peu), une période de jeun ou le saut régulier de certains repas (petit déjeuner, dîner),
  • l’environnement : le changement de temps, les odeurs violentes, les stimulations lumineuses intenses,
  • des cofacteurs alimentaires : les repas gras, les graisses cuites,
  • certains médicaments.

La recherche du rôle favorisant de certains aliments est importante dans un objectif de prophylaxie, mais elle ne doit pas occulter la recherche de cofacteurs.

Suivant les études, l’alimentation serait responsable de la survenue de crises chez 20 à 44% des migraineux.